Morning Chronicle - Les pharmaciens en grève et dans la rue, une première en dix ans

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Les pharmaciens en grève et dans la rue, une première en dix ans

Les pharmaciens en grève et dans la rue, une première en dix ans

C'est la première grande grève des pharmaciens en France depuis dix ans: un grand nombre des officines ont baissé le rideau jeudi pour alerter sur les pénuries de médicaments, les fermetures de pharmacies, un possible assouplissement de la vente en ligne, et réclamer une hausse de leurs honoraires.

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"Pharmacies en danger = santé menacée", "Où est l'Amox?" (raccourci de l'antibiotique amoxicilline, qui connaît des pénuries récurrentes), "Adieu croix verte, bonjour tristesse": ces slogans étaient scandés par des grévistes lors des premières manifestations de pharmaciens jeudi matin en province (Toulouse, Nice, Angers, Limoges, etc.).

Le mouvement rassemble tous les représentants de la profession: syndicats, groupements de pharmaciens, étudiants. La grève n'est pas habituelle dans ce secteur, la dernière d'ampleur remonte à dix ans.

Les syndicats estiment que 90% des pharmacies ont baissé le rideau, voire 100% dans plusieurs villes en province.

Le point d'orgue de la mobilisation se tiendra à Paris, où un cortège partira à 15H30 de la faculté de pharmacie pour rejoindre le ministère de l'Economie.

Jérôme Koenig, directeur général de l'Union de syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo), souligne "une volonté de marquer le coup, comme en 2014", date de la précédente grande mobilisation des apothicaires.

"Après les déserts médicaux, les déserts pharmaceutiques?" s'interroge l'Uspo, alors que la profession estime que la France a perdu près de 2.000 officines en dix ans. Actuellement, il y a 20.000 officines sur le territoire.

"L'inquiétude principale, c'est la disparition des pharmacies", fragilisées économiquement à la campagne et parfois en ville, indique à l'AFP Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).

- Des pharmacies réquisitionnées -

Dans le centre de Paris, près de la place de la Bourse, le pharmacien Alexandre Aunis laissera son officine ouverte jeudi pour "raisons économiques". Après un manque à gagner "en raison des ponts du mois de mai", il ne fermera que de 14H00 à 15H00, en signe de "solidarité".

Des pharmacies ont été réquisitionnées par décision préfectorale pour assurer la permanence pharmaceutique obligatoire. La plupart des officines ont prévenu leur clientèle par mail, écrans ou affiches collées dans les vitrines.

Les syndicats réclament une revalorisation de la rémunération dès 2025, faisant valoir l'inflation qui pèse sur les charges. Les dernières propositions de l'Assurance maladie, dans le cadre des négociations conventionnelles entamées fin 2023, sont jugées "insuffisantes". Les représentants des pharmaciens seront convoqués le 5 juin pour une "réunion conclusive" avec l'Assurance maladie, selon M. Besset.

Outre l'aspect financier, les pharmaciens veulent mettre l'accent sur les pénuries de médicaments, la fragilisation économique des officines rurales et la réforme du troisième cycle des études de pharmacie qui tarde à aboutir.

Comme en 2014, les représentants de cette profession s'inquiètent aussi d'une possible volonté de simplifier la vente en ligne de médicaments sans ordonnance.

"Tous les éléments sont là pour tuer le réseau" d'officines - qui emploient 130.000 personnes au total -, alerte Pierre-Olivier Variot, président de l'Uspo.

"Il faut raison garder", a déclaré de son côté à l'AFP le député Renaissance Marc Ferracci. Il y a bien "une réflexion pour savoir s'il est pertinent ou non d'assouplir" les règles de vente en ligne des médicaments sans ordonnance, confirme-t-il, mais sans "remettre en question le principe du monopole" des officines.

Plusieurs syndicats de pharmaciens refusent catégoriquement "les stocks déportés" à un endroit autre que l'officine. Ils craignent de voir Amazon débarquer un jour sur ce terrain.

"Il ne s'agit pas d'ouvrir quoi que ce soit à la grande distribution ni de mettre des médicaments sur Amazon. Cela n'a aucun sens", assure M. Ferracci, qui veut mettre fin aux "spéculations" qui ont animé la presse spécialisée ces dernières semaines

L.Lawrence--MC-UK